Moi qui étais si contente de découvrir que j’avais passé ma vie à enseigner les Sciences Physiques pour que des objets du niveau des 7 Merveilles du Monde Antique soient conçus et construits de nos jours, voici qu’aujourd’hui je dois écrire ces mots : le bel objet technique a tué. La Concordia avait des défauts de construction.
Au moment du choc avec le Scole,
des assiettes ont volé, des personnes ont été bousculées, mais aucun pronostic vital n’a été engagé.
Suivons ensuite la trajectoire de la Concordia,
je l’ai replacée au-dessus d’une carte marine où on lit bien les profondeurs et mis en couleurs les différentes zones.
En s’immobilisant sur plus de 100 m, 80 m, 30 m de fond, avec son trou béant à la poupe le paquebot sombrait comme dans la première partie de cette vidéo, avec des variantes, à savoir qu’il aurait basculé sur le côté et se serait enfoncé avant de se retourner à cause de l’air emprisonné dans les cabines fermées, ensuite le navire se serait cassé, n’oublions pas qu’il fait 300 m de long, même la moitié, non soutenue, c’est impossible et toutes les personnes qui étaient à bord périssaient.
Avec 20° de gite vers la droite, si le paquebot est échoué directement sur la pointe Gabbianara, il glisse et tombe dans le haut-fond voisin. Même sort pour tout le monde.
Il a fallu aller tourner sur un haut-fond de 100 m pour pouvoir présenter le côté penché aux roches en pente du fond en étant incliné pareil et se poser dessus avec le maximum de chances de rester en place.
Pendant cette manœuvre : 0 blessé, 0 mort.
Une fois le paquebot échoué,
l’évacuation a commencé immédiatement. Le signal avait été donné un peu avant le contact avec le fond. Tout aurait du se passer pour le mieux.
Mais ça s’est mal passé. Aujourd’hui les familles de ceux qui ne sont pas revenus savent, de façon officielle, quand et comment leurs proches sont morts. Les journaux de langue française ont transmis l’information, je vais être la plus brève possible.
Ce paquebot qui est arrivé devant le petit port de l’ile du GIGLIO avec déjà 20° de gite parce que ni les portes étanches ni les pompes dans la soute qui auraient du le redresser n’ont fonctionné,
ce paquebot s’est calé sur le granite du fond marin en prenant de plus en plus de gite jusqu’à ce que les hublots des ponts inférieurs passés en dessous de la ligne de flottaison subissent de la part de la mer une pression à laquelle ils n’étaient pas capables de résister.
Et ils ont cédés tous ensemble,
et l’eau est entrée aussi par la droite et n’a pas pu ressortir
et la Concordia s’est couchée complètement en un instant.
Il y avait eu une bavure à gauche : des touristes russes sont montés dans des chaloupes qui n’étaient pas les leurs d’après le plan d’évacuation. Ils ont sorti des liasses de billets et … on est très pauvre dans certains pays au point d’en oublier son devoir qui est de suivre les consignes, en clair assurer le calme et l’ordre en cas d’urgence et de détresse du navire.
Alors, parmi ceux qui auraient du être déjà partis normalement et se trouver à présent en sécurité, 32 personnes au moins n’ont pas eu leur place sur les chaloupes de gauche qui avaient de plus en plus de mal à descendre parce qu’elles commençaient à frotter sur la paroi de la coque et ont été orientées vers la droite du bateau où avait été mise en place une navette entre la côte plus proche et le pont 3.
Le pont 3 où cette saisie d’écran prise sur une vidéo publiée sur le journal italien La Repubblica vous montre le Commandant SCHETTINO, en uniforme bleu marine et cravate, sans gilet de sauvetage, le téléphone mobile à la main et à l’oreille, qui surveille l’évacuation du côté qui s’enfonce dans l’eau.
On sait la suite : ces 32 personnes ne sont pas arrivées dans les chaloupes. Pour la plupart ce sont les couloirs qui se sont transformés en puits de la mort, deux d’entre elles, arrivées jusqu’au pont, sont tombées à la mer et ont été écrasées par les 100.000 tonnes du navire. Elles sont encore dessous.
Quand le TITANIC a heurté son iceberg,
il n’y avait rien, aucun texte ne se préoccupait de la sécurité sur les paquebots de croisière au point qu’il n’y avait pas assez le canots de sauvetage pour évacuer tout le monde lorsqu’il a sombré.
Cette catastrophe a été suivie de la mise en place de la Convention internationale SOLAS où bien des points nécessaires ont été couchés sur le papier et un grand nombre de pays s’est engagé à la suivre.
Mais on ne s’est alors occupé que de la moitié des conditions de travail des paquebots en mer. Déjà des réunions de travail ont eu lieu pour tirer les leçons de l’accident de la Concordia.
La Concordia n’était pas stable.
Nous venons d’apprendre, suite à l’enquête menée par les experts d’associations de consommateurs italiennes qu’elle avait des portes étanches poreuses. Du matériel défectueux ou inadapté pour la navigation et pour la sécurité depuis la passerelle jusqu’au fond des cales, ce qui n’arrange rien.
La moitié des équipements électriques qui auraient été nécessaires au maintien du calme intérieur de tout le monde, éclairage minimum par exemple, n’était pas branché sur le générateur de secours. 3000 passagers ont paniqué et sont encore maintenant plus ou moins traumatisés selon le vécu de chacun et son tempérament.
La Concordia n’était pas stable, elle n’a pas pu récupérer sa verticalité et passé une certaine inclinaison elle a basculé brusquement lors de son échouement.
Et comme le chapitre 13 de la Convention SOLAS précise que la meilleure solution, celle que tout bon Capitaine doit s’efforcer de mettre en pratique, c’est précisément de garder tout le monde à bord, de se rapprocher d’une côte et d’y échouer le bateau, le prochain paquebot qui a un pépin, s’il n’est pas stable non plus, va se trouver dans la même situation.
La Concordia, globalement, a eu de la chance entre le Scole et l’évacuation.
- Parce qu’elle n’était pas loin des côtes quand « c’est » arrivé.
- Et parce que son Commandant a réussi à la ramener à la côte et à l’y échouer.
Avec 20° de gite pendant tout le trajet. Avec seulement les propulseurs d’étrave qui fonctionnaient. Avec sa carte des courants et des vents du jour. Pas de pompes pour l’eau qui rentrait. De toute façon, des portes pas étanches. Il aurait fallu pouvoir pomper la Méditerranée.
#1 par claudielapicarde le 27 mars 2013 - 14 h 29 min
Ce pauvre paquebot a fait les frais d’erreurs humaines, il ne s’est pas construit tout seul donc il est innocent.
bises Monique et bonnes Pâques.
#2 par Monique-Mauve le 27 mars 2013 - 16 h 55 min
Tu as raison, Claudie, la Concordia ne s’est pas construite toute seule. Merci pour elle et tous ceux qui l’aiment encore, malgré l’état où elle est réduite.
Bisous de Pâques Claudie.
#3 par Ky@ la mouette le 27 mars 2013 - 12 h 15 min
Bonjour ! J’aime tes explications, je comprends tout ! Merci ! Les cloches vont passer par chez toi ? Bisous
#4 par Monique-Mauve le 27 mars 2013 - 12 h 17 min
Merci Fr@ne. Sûr, elles ont déjà apporté des petits oeufs Kinder que mon père a à moitié dévorés. Bisous du matin.