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Francesco SCHETTINO :  » Je n’ai pas abandonné le navire. « 

interview parue en Italie le 05/12/2012 dans l’émission Porta a Porta qui en a réalisée toute une série donnant la parole à celui qui allait rester aujourd’hui seul devant tous au Tribunal de GROSSETTO sans avoir vraiment été entendu de l’opinion publique jusqu’ici, tout simplement, du moins en France, parce que cette série d’interviews n’a été ni diffusée, ni traduite.

ce que le souriceau de bord a réussi à comprendre :
Je n’ai pas abandonné le navire.
Le navire s’est écroulé et j’ai été le dernier à quitter le navire du côté immergé.
Il restait peu de gens sur le côté gauche.
Je savais que le navire ne s’enfoncerait pas davantage.
Il restait du monde sur le côté droit.
 
Comment vous êtes-vous retrouvé sur une chaloupe ?
 
Je suis tombé en même temps que cette chaloupe.
Dans la dernière chaloupe qui était déjà sur l’eau pour effectuer le va-et-vient qui me garantissait l’évacuation de tout l’équipage.
La dernière chaloupe était disposée tout près de façon à ce qu’on puisse y embarquer depuis le navire.
C’est arrivé tout seul, je ne peux pas dire que j’y suis allé dedans.
La chaloupe était menacée par un dispositif de suspension des chaloupes du pont 4 juste sous lequel elle se trouvait.

Ce fut instantané, j’ai fait une chute de 20 m de haut.

Comme si j’étais tombé d’ici. (NDS : le Commandant et la journaliste sont sur une terrasse qui surplombe la baie de NAPLES, dont META DI SORRENTO est un faubourg, à la façon d’une falaise).

Et puis j’ai continué de faire ce que je faisais, de tout encadrer depuis là.
La chaloupe a continué à être en danger jusqu’à ce que …
Il est beau de mourir en ayant fait tout ce qu’on pouvait / en laissant derrière soi un boulot fini.

Mais à ce moment là je n’y pensais même pas, j’attendais que le navire ait fini de basculer :tout le côté était en train de passer sous l’eau.

Il y avait des gens avec moi sur cette chaloupe, au lieu de mourir, j’ai accompagné ces personnes-là jusqu’au bout.

timonier

Il y avait à côté de la proue une chaloupe qui était restée coincée obliquement et le navire qui était en train de lui tomber dessus (NDS : on la voit au fond).

La côte était toute proche.

La chaloupe sur laquelle j’étais a réussi à y parvenir et nous nous sommes retrouvés à terre.

C’est comme ça.
C’est comme ça.
C’est le basculement de la Concordia.

Et ça se voit sur les photographies.

(NDS : cette image est floue parce que le bateau a basculé plus rapidement que la caméra ne prenait de photos par seconde)

Tout ce qui a été dit au public à ce sujet depuis sur ce moment précis est une belle élucubration erronée.
J’ai toléré que ces choses soient dites parce que, en tant que Commandant, je représente beaucoup de choses.

 fin de l’enregistrement

 

Le souriceau fait le point : où en sommes-nous ?
Le basculement de la Concordia est aussi l’évènement qui a fait 30 morts et 2 disparus, comme il l’a été officiellement communiqué à leurs familles par le Parquet de GROSSETTO.
 
Avant ce basculement, il y a eu un accident, un choc avec un élément du décor comme il en arrive sur la route, il y en a plein les journaux tous les jours.
A partir de cet accident le Commandant et l’équipe de service sur la passerelle devaient, selon l’article 13 de la Convention Internationale SOLAS, c’est-à-dire pour la sécurité maximale des passagers, ramener le navire le plus près possible d’une côte et l’échouer.
Ils l’ont fait.
Ensuite, le Commandant assisté de tout l’équipage devait le faire évacuer entièrement par tout le monde, et c’était possible parce que tout le monde était alors vivant. La Concordia, en principe et comme tous les paquebots modernes, devait rester verticale après tout choc pendant 3 heures.
 
L’évacuation, déjà rendue difficile par une gîte importante qui la ralentissait quand elle n’empêchait pas carrément les chaloupes de descendre, a été interrompue par ce basculement brusque, rapide et meurtrier, les hublots immergés n’ayant pas résisté à la pression qu’exerçait sur eux l’eau de la mer et cédé tous ensemble.
 
C’est le basculement – imprévu – de la Concordia qui a fait d’un accident certes matériellement important, une catastrophe de dimension humaine.

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Fraternité

dans une équipe de marins du XXIème siècle :

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Egalité

 

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Une chose encore aurait pu sauver 32 vies humaines

Une balise cardinale Est, une balise de danger installée au raz de l’eau, une toute petite balise comme celle-ci :

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Une perche cardinale serait encore mieux, la même que celle-ci, avec deux triangles noirs en haut et un un feu à trois scintillements blancs qui indique dans la signalisation européenne que quoi qu’il arrive, il faut passer à l’est de la perche, installée sur les écueils du SCOLE.
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Steinsundet, la nuit

Rien que cette petite balise, sur un rocher.
Il n’y en a pas.
Pourquoi ?
 Pourquoi ? « le touriste ! il faut que rien ne risque de perturber le touriste. »
Trouvez-vous vraiment que de jour celle-ci défigure le paysage ?

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L’échouage du Royal Majestic : l’électronique, l’informatique et l’Homme

ou comment un Commandant peut se trouver hors de la route qu’il a demandée sans le savoir
 
Le Commandant du ROYAL MAJESTY, paquebot de croisière transportant 1462 passagers et 620 hommes d’équipage, s’en est aperçu trop tard. Son bateau s’est échoué la nuit du 10 juin 1995 à 17 milles de distance de la route qu’il avait demandée. C’était sur le banc de sable Rose and Crown et il n’y a eu ni morts ni blessés, des dégâts matériels importants ont fait qu’il y a eu une enquête.

rapport d’accident en anglais de 22 pages là : http://ti.arc.nasa.gov/m/profile/adegani/Grounding%20of%20the%20Royal%20Majesty.pdf

résumé en français des échanges Commandant – Officiers de quart là : http://www.techno-science.net/?onglet=glossaire&definition=14226

J’explique :

Le bateau devait arriver au port de BOSTON en suivant un chenal abondamment balisé lumineusement parce qu’à sa gauche il y avait de multiples dangers sous forme de bancs de sable et en particulier une ile : NANTUCKET et le banc sable  Rose and Crown parmi beaucoup d’autres.
Il était muni des instruments de navigation les plus sophistiqués : compas, radar, pilote automatique qui s’appelait NACOS 25, GPS lié aux satellites et LORAN-C qui est un autre système de positionnement pour plus de sûreté.
 
Le problème est venu de l’antenne reliée au GPS dont le fil électrique s’est cassé une heure seulement après le départ. Cela a été signalé par un seul tout petit « bip » que personne n’a entendu parce qu’il aurait fallu y être à côté et que, par un malheureux hasard, il n’y a eu personne là.
Ensuite, le système de positionnement a envoyé les messages :

GPS, 1:11:46, latitude, longitude, invalid.
GPS, 1:12: 09, latitude, longitude, invalid.
GPS, 1:12: 51, latitude, longitude, invalid.
Invalid : ne vous fiez pas à moi, je donne des renseignements qui ne sont plus bons, la machine prévenait désespérément, mais l’appareil suivant ne pouvait pas le savoir, l’interface entre eux ne recevait que tout ce qu’il y avait avant le mot d’alerte.
 
Alors le pilote automatique a conduit le bateau en faisant une erreur d’une fraction de mille par heure vers l’Ouest toute la nuit. Ça s’est accumulé puisque personne n’est intervenu dans l’automatisme et à l’échouage, on en était à 17 milles.

et voilà ce que l’écran radar montrait tout en n’y étant pas.

Le Commandant a demandé aux Officiers de quart qui se sont succédé à la barre si tout allait bien et ils lui ont répondu que oui, tous les instrument indiquaient la bonne route et les vérifications qui court-circuitaient l’erreur l’avaient confirmé. Il est venu et a regardé les quadrants et lui non plus n’a pas vu les deux trop petites marques qui étaient apparues sur un des cadrans après le « bip » :

SOL et DR, et il aurait fallu voir les deux pour s’apercevoir de quelque chose et prendre les mesures salvatrices, revenir aux bonnes vieilles méthodes de la Marine à voile par exemple.

Les vigies avaient bien dit quelles lumières elles voyaient et où au fur et à mesure, leur couleur, leur fréquence, puis que l’eau changeait de couleur, ce qui était bizarre. Mais l’Officier de quart avait toujours conclu en confiance avec ses autres renseignements et il a répondu « oui, on a passé la balise » alors qu’il n’avait repéré « quelque chose » que sur son écran radar, et vu l’échelle où il l’avait réglé, il n’avait pas pu se rendre compte que ce n’était pas la première balise du chenal puis la seconde.
 
Et est arrivé le moment où le bateau a vibré, s’est penché d’un côté, puis de l’autre, il a talonné.Le Commandant surgit sur la passerelle, le jour commence à peine à se lever. Il voit l’ile de NANTUCKET à sa gauche sur le radar qu’il vient d’allumer à babord, il crie : « à droite toute ! ».  Trop tard, le ROYAL  MAJESTIC s’est échoué.

Ils n’ont pas su parce qu’ils n’avaient pas appris au cours de leur formation, et aucun ne pouvait deviner que les appareils dont on avait doté leur paquebot n’avaient pas été soigneusement adaptés entre eux au point de ne pas transmettre une chose aussi importante !

Les deux Officier de quart qui se sont succédé ont eu tellement confiance en ce système moderne, qu’ils n’ont pas réalisé que les observations visuelles ne cadraient pas.

Ils ont reporté deux fois au Commandant sans préciser « j’ai vu la bouée que vous me demandez – sur le radar seulement ». Dommage parce que ce n’était pas elles.

Ils avaient un sondeur, je crois qu’il n’était pas allumé. Vu la route qu’ils devaient suivre, il n’y en avait pas besoin. Le pilote automatique les tiendrait loin des bas-fonds.

L’accident du Royal Majesty a été analysé, l’analyse a été suivie de quelques recommandations :

  • observer les amers (à vue) et avertir le commandant en cas d’absence d’observation d’un amer important,
  • utiliser le sondeur,
  • utiliser plusieurs systèmes pour déterminer la position.
Des recommandations seulement.
C’était en 1995.
Il se peut que quelque chose de semblable soit arrivé la nuit du 13 janvier 2012 sur la passerelle de la Concordia.

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