COSTA CONCORDIA, la bataille pour les projets
Le Tar (Tribunal Administratif de Région) : vous devez les remettre aux survivants.
Les avocats demandent les papiers du RINA, la Compagnie s’y oppose : ‘ C’est comme ça qu’on révèle des secrets industriels ».
Mais le Tribunal Administratif a conclu en faveur des familles.
un article de Marco PREVE, paru le 15 mars 2015 sur le journal LA REPPUBLICA
Il y a des craintes d’espionnage industriel et des intérêts de l’ordre du million d’euros derrière la tragédie de la CONCORDIA, perdue en 2012.
Les juges du TAR de LIGURIE, entre le droit des survivants et des associations de consommateurs à se constituer partie civile contre la Société COSTA CROISIÈRES et à lui demander une indemnisation, et la peur de la Société FINCANTIERI de se voir arracher de précieux secrets industriels, ont choisi de donner raison aux premiers, leur accordant l’accès à des documents top-secrets délivrés par le RINA. C’est à un cas tout à fait exceptionnel qu’ont du faire face les juges du TAR de GÊNES au cours des dernières semaines.
Tout a commencé par une demande faite au RINA par CODACONS (en tant que coordinateurs des Associations pour la sauvegarde de l’environnement et des droits des usagers et des consommateurs) et par Ernesto CARUSOTTI, l’un des croisiéristes survivants à la tragédie du GIGLIO lorsque, en janvier 2012, le navire s’est échoué sur les rochers, prenant la vie de 32 personnes. CARUSOTTI et son épouse ont été parmi les premiers à participer à la « class action » contre la compagnie.
Ce qu’ils demandaient au RINA, c’est une copie des « procès-verbaux des tests du générateur d’urgence et de l’équipement de sécurité qu’il alimentait, ainsi que des procès-verbaux des essais de « Redémarrage d’urgence après black-out – Balance du retour de l’électricité après un long black-out » effectués dans le but de délivrer les certificats obligatoires pour les navires à passagers ».
Il s’agit là de la documentation technique sur les systèmes d’alarme et de sécurité nécessaire pour pouvoir se constituer partie civile au procès et demander une réparation.
Le RINA avait consenti sans problème, mais à ce moment-là, FINCANTIERI s’y était opposé en soutenant que l’accès à ces documents « qui n’étaient pas indispensables, violeraient les intérêts industriels et commerciaux relatifs à la méthodologie et au savoir-faire développé et utilisé par FINCANTIERI pour vérifier que les réponses effectives en situation d’urgence soient conformes aux exigences prévues par les textes » de classification des navires.
En somme, FINCANTIERI avait peur que des secrets industriels puissent être divulgués une fois dans des mains étrangères.
Dans un premier temps, la Société de moteurs ISOTTA FRASCHINI s’y était opposée aussi, puis avait renoncé à faire appel. FINCANTIERI s’opposait surtout à la communication de ce qu’on appelle les « protocoles de tests ».
Après toute une série de tentatives de médiation, il semblait qu’on soit parvenu à un accord, puisque la « documentation requise avait été vue et il en avait été fait copié, avec toutes les « omissions » faites par le demandeur FINCANTIERI en ce qui concerne les fameux « protocoles de tests ».
Mais les problèmes ont apparu au sujet de ce qu’on appelle les « tests relatifs au black-out ».
CODACONS et CARUSOTTI qui voulaient l’accès à l’intégralité du document « s’étaient rendu compte qu’on avait mis à leur disposition seulement 2 pages de texte sur 7 ».
Vu que les parties en présence n’étaient pas arrivées à un accord, le TAR a du se prononcer.
Dans la sentence qui rejette l’appel de FINCANTIERI, les juges écrivent : « Les exigences de confidentialité générales dans l’industrielle opposés par le demandeur (l’entreprise FINCANTIERI) sont certainement secondaires par rapport aux intérêts que soutient le RINA qui est une instance supérieure (de l’état) et qui, lui, a donné le feu vert. »
Ainsi, les juges administratifs ont objecté que « même l’idée du danger d’un préjudice grave et irréparable qui résulterait pour FINCANTIERI à cause de sa façon d’exécuter les essais contestés d’après ses note est de trop, car elle suppose un saut de la logique qui implique la perpétration d’un crime. »
De fait, continue le TAR, « autoriser l’accès aux ayant-droit, n’est certes pas équivalent à autoriser aussi la divulgation ou la publication sans discrimination de secrets scientifiques ou industriels, dont la révélation injustifiée est sanctionnée pénalement ».
Le collège formé du président Giuseppe CARUSI et des juges Roberto PUPILELLA et Angelo VITALI, a condamné FINCANTIERI et ISOTTA FRASCHINI à payer les frais du procès (trois mille euros par personne) pour le RINA, CODACONS et CARUSOTTI.